Les trois insignes de promos

Souvenez-vous, c'était le 08 novembre 1986...

AVERTISSEMENT :

Les textes figurant dans cette page ont été écrits en 1986. Ils doivent donc être replacés dans leur contexte de l'époque.

 
- EXTRAITS D'UNE LETTRE DU PERE SYSTEME ADRESSEE AU COLONEL COEFFET
- DISCOURS DE PARRAINAGE
-
PRESENTATION DE LA PROMOTION "ROI ALEXANDRE 1er DE YOUGOSLAVIE"
-
PRESENTATION DE LA PROMOTION "LIEUTENANT-COLONEL JEANPIERRE"

 

 

 

 

 

 

 

  LETTRE DU PERE SYSTEME (EXTRAITS)
Le Père Système de la Monclar
(...) Notre rentrée, à 160 élèves, a eu lieu début septembre 1984 pour un mois de "formation initiale des Elèves officiers d'active". Durant cette période, nous sommes entre Saint-Cyriens seulement (le nom traditionnel des Saint-Cyriens du 3° Bataillon est "Embryon") et encadrés de très près par les traditionnels "Gradés aux jeunes" (deux par section d'une douzaine à peu près), le Vorace (pardon, cadre de contact !) et son sous-officier adjoint.

Le rythme est alors très soutenu, la formation reposant essentiellement sur l'acquisition de la rigueur nécessaire (revues de casernement, d'armoires aux effets amoureusement pliés en piles format 21x29,7...) et de la résistance à l'effort physique et au sommeil. Ce mois, éprouvant physiquement et nerveusement, se clôture d'un week-end de permission et d'un raid à côté duquel le raid final du CNEC m'a fait l'effet d'une promenade de santé.

En novembre, Elèves officiers de réserve, Commissaires et Polytechniciens se joignent à nous, harmonieusement répartis dans les sections d'origine (ce qui double l'effectif du bataillon) et nous suivons ensemble les quatre mois classiques de formation de tout bataillon EOR.

Avec le recul, cet "amalgame" me semble être une expérience enrichissante, tant pour nos camarades non saint-cyriens qui bénéficient à cette occasion d'une formation probablement plus poussée que celle des EOR normaux, que pour nous qui trouvons ici une ouverture sur des milieux variés et sensiblement différents du nôtre quant à l'esprit et aux motivations. Nous gardons généralement d'excellents rapports, par la suite, avec nos camarades Commissaires, Polytechniciens et Officiers de réserve.

A l'issue de ces cinq mois, nous sommes baptisés (notre promotion "amalgamée" du 3° Bataillon s'appelle "Victoire de la Marne"), recevons nos galons d'aspirant et partons en corps de troupe.

La répartition dans les corps de troupe se fait, pour les Saint-Cyriens, par tirage au sort. Nous sommes envoyés dans toutes les armes (du Matériel à l'ABC) et nous servons, dans les régiments, comme chef de section FETTA dans la plupart des cas.

Arrivés dans les régiments début février, nous en repartons fin juin (soit un stage de cinq mois).

Regroupés à Coëtquidan et reformés en sections qui seront définitives jusqu'au jour tant attendu du Pékin de Bahut, nous vivons notre dernier mois de 3° Bataillon à Montlouis et à Collioure, en effectuant le stage commando du 2° niveau : chef de section commando.

Ce stage nous permet de souder les gens entre eux et de former la cohésion du Bataillon pour les deux ans à venir.

Début août, le départ en permission se fait dans une allégresse et une joie qui n'appellent aucun commentaire : je crois que l'on n'apprécie jamais autant l'Ecole que lorsqu'on l'a définitivement quittée.

Deuxième Bataillon, nous avons effectué notre rentrée en septembre 85. Après un mois de remise à niveau grâce à un rappel de l'enseignement militaire suivi en première année, nous nous sommes attaqués à l'enseignement général - monstre mystérieux et sournois - début octobre.

Parallèlement, se déroulait notre bahutage par nos anciens de la promotion "Lieutenant-colonel Gaucher", et fin octobre nous recevions, instant tant attendu, notre Casoar.

La deuxième année de l'ESM consiste aujourd'hui en une alternance de périodes militaires d'une semaine ou deux, et de périodes d'enseignement général.

Pour finir l'année scolaire en beauté, nous passons la fin du mois de juin à Pau pour le BIPM, puis nous partirons pour un voyage d'étude d'une dizaine de jours au Maroc.

Notre promotion sera baptisée lors du Triomphe de la "Gaucher", le 27 juillet 1986.

Il serait prétentieux de ma part de vouloir vous décrire la vie du 1° Bataillon ; je peux seulement vous dire que les Sous-lieutenants y sont confrontés au seul enseignement général et n'ont presque plus d'activités militaires. (...)

 

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  DISCOURS DE PARRAINAGE

 Le parrainage
Photo Ristori - Coëtquidan

  Saint-Cyr Coëtquidan, 8 novembre 1986

 

Promotion Lieutenant-Colonel JEANPIERRE
Parrainage de la Promotion Général MONCLAR

Allocution du Colonel COEFFET, de la Promotion
Lieutenant-Colonel JEANPIERRE

 

PARRAINAGE. Le parrainage se dit de celui qui reçoit une personne dans un ordre de chevalerie, dans un ordre honorifique et qui lui en remet les insignes. Les officiers de la Promotion Roi Alexandre de Yougoslavie et ceux de la Promotion Lieutenant-Colonel Jeanpierre parrainent ce soir à Saint Cyr Coëtquidan les officiers de la Promotion Général Monclar.

Officiers de la Monclar, vos pairs de la Roi Alexandre et de la Jeanpierre à plus de 200 ont quitté leurs unités, leurs retraites, leurs familles pour venir ce soir des quatre coins de l'hexagone vous recevoir dans notre ordre : chevaliers de jadis, officiers d'aujourd'hui.

Au Moyen Age, l'adoubement était le point d'aboutissement de la formation physique et morale au dépassement de soi du jeune chevalier. Le jeune homme s'y préparait dans le calme d'un monastère. Le moment venu, il prenait un bain, symbole de pureté, passait la nuit en prière devant l'autel sur lequel on avait placé son épée. Le matin, il s'habillait d'une robe de lin ou de soie blanche, symbole de chasteté, d'un surcot écarlate rappelant qu'il devait être prêt à verser son sang, et de chausses brunes aux pieds, images de l'attachement à la terre et d'humilité. Puis il entendait la messe ainsi que les autres participants à la cérémonie avec lesquels il partageait ensuite le festin. Le senior qui l'avait formé lui remettait alors ses armes.

En 1986, les modalités se sont simplifiées mais le symbole reste le même, l'entrée dans le corps des officiers qui, comme celui des chevaliers d'autrefois, se fonde sur un esprit et des devoirs. C'est ce qu'avant la messe et le festin, avant la fraternisation nocturne nous sommes venus vous dire, officiers de la Jeanpierre à vous nos compagnons de la Monclar.

Vous entrez dans un ordre, un ordre viril par excellence, ordre des chefs, qui exige quatre sens principaux autour desquels se regroupe tout l'accessoire :
- sens de la responsabilité;
- sens de l'honneur;
- sens de la qualité;
- sens de la force.

Responsabilité. " Chaque sentinelle je la veux responsable de tout l'empire ". Vous ne pourrez assurer l'autorité sans responsabilité. Vous ne pourrez user de l'autorité sans tenir compte du droit d'autrui à responsabilité; responsabilité vis-à-vis de la communauté, responsabilité non seulement des choses qu'on a sous sa garde, des êtres confiés, de la mission à accomplir, mais aussi et pour commencer de soi-même. Et c'est là que notre responsabilité rejoint la liberté, la vraie, la seule qui soit, viable et constructive, d'essence spirituelle; être spirituellement libre, c'est avoir la responsabilité de soi-même.

Et vous ne prendrez pas de responsabilité sans risque = être responsable, c'est être prêt à assumer des risques de degré variable, en y incluant le degré suprême, celui de la mort, tout en ayant un amour passionné, viril, de la vie. " Risquer sa peau ", dit la puissante expression vulgaire. N'est pas un homme, si bien doué, si magnifiquement doué soit-il par ailleurs, celui qui, à certains moments, tient trop à sa précieuse peau. Le sens de la responsabilité qui fonde un certain mépris viril de la mort vient en même temps le mesurer et le qualifier.

L'honneur. L'honneur, c'est un sentiment, né avec l'homme, indépendant des temps, des lieux et même des religions, un sentiment fier, inflexible, un instinct, d'une incomparable beauté. L'honneur, c'est une religion mâle sans symboles et sans images, sans dogme et sans cérémonie, dont les lois ne sont écrites nulle part. L'homme, l'officier, au nom d'honneur, sent remuer quelque chose en lui qui est comme une part de lui-même. Ce sentiment de l'honneur, qui veille en nous comme une dernière lampe dans un temple dévasté.

L'honneur, c'est la conscience exaltée. C'est le respect de soi-même et de la beauté, de la vie portée jusqu'à la plus pure élévation et jusqu'à la passion la plus ardente; toujours et partout il maintient dans toute sa beauté la dignité personnelle de l'homme. Son aimant magique attire et attache les cœurs d'acier, les cœurs des forts. L'honneur c'est la pudeur virile. C'est un engagement personnel qu'à vingt ans vous contractez envers vous-mêmes, à Saint-Cyr, au premier régiment, en face du premier Drapeau, à côté du premier Capitaine.

La Qualité. Elle ressort essentiellement à l'ordre viril. La qualité c'est la hauteur, sœur de la grandeur. Elle exclut la bassesse. La mesquinerie, la petitesse, la bassesse d'âme, la peur excessive de la mort précisément sont sources de toutes les bassesses. On s'entend toujours à une certaine hauteur. La qualité est aussi sœur de la faculté de mépris. Le mépris fait partie de l'estime. Qui ne méprise pas le mal, le bas, pactise avec lui, et que vaut l'estime de qui ne sait pas mépriser ? Mais, contre poids du mépris, soyez capables d'admirer. L'esprit de dénigrement, le jugement sceptique, la tendance à rabaisser les hommes ou les idées proposées à l'admiration ne sont pas signe de qualité. Votre faculté d'admirer aura pour suite normale la faculté de vous donner et le don de l'homme à l'homme qui en est digne, est une chose magnifique, source de la plus haute joie virile même si comme l'honneur, il peut paraître féodal.

La force. Le chef est celui qui sert le mieux sa troupe parce qu'il possède des forces. Il s'agit de posséder et de nourrir en soi un sentiment robuste de la vie et de ce sentiment découle naturellement l'horreur du négatif,. du destructif. Force du corps, force d'esprit, force d'âme.

Force du corps; l'aptitude, la force acquise et maintenue, la résistance au sommeil, à la fatigue, à l'énervement, aux privations; la solidité, source de courage et origine de la gaîté. Le corps n'est certes qu'un instrument mais il est nécessaire que l'instrument soit bon et exercer en homme ce corps, c'est exercer en même temps à toute occasion sa volonté commandante. C'est vérifier par l'intermédiaire du corps, son ardeur, son endurance, son courage et son audace sans lesquels la vigueur pure n'est qu'une qualité de mauvais esclave.

Force d'esprit, qui alliera à l'intelligence la capacité d'étreindre la réalité corps à corps pour lui arracher ses secrets.

Force d'âme surtout, car enfin et par dessus tout, tout est toujours d'abord à l'intérieur de l'âme, c'est la force sur soi-même, la maîtrise de soi-même, la possession de soi-même. C'est se tenir en main, au physique, au moral, à l'intellectuel; si l'on a des passions, des désirs, les dominer, les mettre à leur place, en rester maître, les piloter, ne jamais lâcher le gouvernail quels que soient la force et le tumulte de ce qui bouillonne et fermente dans notre cuve intérieure, ne jamais se départir de la patience, de l'égalité d'humeur; qu'une part sereine et inattaquable de soi survole toujours les autres parts.

Pour quel usage cette force d'homme, cette force d'officier? Pour vous-mêmes, pour votre personne, afin d'être capables de maintenir à travers tout ce qui pourra vous advenir votre intégrité, afin de SERVIR EN COMMANDANT.

Vous êtes entrés dans l'Armée pour y servir votre pays en commandant des hommes. Servir et commander tout est là.

Servir, acte volontaire et conscient de toute personne qui se donne librement et totalement à un idéal qui le transcende.

Servir, se révéler, se réaliser, se dépasser, se grandir en s'identifiant à cet idéal.

Servir, s'exalter en se dominant par la pratique de ces grandes vertus que l'on nomme la foi, l'humilité, l'abnégation, la générosité.

Servir, c'est notre ambition, c'est notre gloire quoi qu'il en coûte et même parce qu'il en coûte.

Servir, c'est choisir une route vers votre finalité d'homme.

Commander est vocation d'officier, vocation mais non apanage car commander est le devoir et non la prérogative de toute personne responsable de l'autorité qui lui est confiée pour l'exécution d'une mission déterminée.

Commander c'est détenir la puissance de décider, d'ordonner et de mener des hommes à l'action.

Commander c'est essentiellement conduire des hommes, c'est être responsable de vos hommes, devant eux, devant vos chefs, et en définitive devant Dieu.

C'est posséder un pouvoir tellement extraordinaire que c'est en quelque sorte avoir une ressemblance avec le souverain du monde. La grandeur de l'homme a là ses racines.

Seul alors a le droit de commander celui qui donne l'exemple, dans l'enthousiasme. " Il faut dans toute œuvre autre chose encore que de vouloir réussir, il faut la loi enthousiaste, car rien de grand ni de beau ni de durable ne se fait sans une étincelle permanente d'enthousiasme ".

Messieurs les officiers de la Promotion Général Monclar, Messieurs les officiers du 1er Bataillon de France, soyez ces hommes véritables, ces officiers à l'âme de croisés, passionnés de votre idéal, obéissant à son service et prêts au sacrifice pour le défendre.

Chevaliers de jadis, officiers d'aujourd'hui, gardez toujours en émoi vos âmes de chevaliers et bon vent au service de la France.

Pau, 5 novembre 1986
Colonel Philippe Coëffet

 

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PROMOTION "ROI ALEXANDRE 1er DE YOUGOSLAVIE"
(1934 - 1936)
insigne Alexandre 1er
Photo Ristori - Coëtquidan

 

<< Entrée à la Spéciale en 1934 au nombre de 306, dont un officier étranger, HUSSEIN ZOGU, neveu du roi d'Albanie, la promotion "Roi Alexandre 1er de Yougoslavie" se choisit comme Système le Lieutenant LAPADU HARGUES. Celui-ci, dont le fils Antoine fait partie de la promotion "Jeanpierre", sera un des premiers "morts pour la France" en 1939. La promotion a en effet payé un lourd tribut dans les différentes campagnes qui se sont succédées depuis sa sortie d'école : Narvik, France et Belgique, Maroc et Tunisie, Libye et Italie, déportation et résistance, Chine et Indochine, voici les lieux où 58 de ses officiers (soit 1 sur 5) sont "morts pour la France".

En 1986, la promotion se trouve très présente en région parisienne, et encore très active puisque le Général d'armée de GALBERT est l'actuel Gouverneur militaire des Invalides, comme le fut avant lui le Général MONCLAR. S'il n'est pas possible de rassembler à Coëtquidan le 08 novembre 1986 les 170 officiers formant aujourd'hui la très bahutée promotion Roi Alexandre 1er de Yougoslavie, les présents sont heureux de pouvoir entourer leurs jeunes de la Jeanpierre et de la Monclar. >>

 

Le roi Alexandre 1er de Yougoslavie

Alexandre 1er

<< Né le 16 décembre 1888, Alexandre 1er Karageorgévitch fut roi de Yougoslavie de 1921 à 1934. Fils de Pierre 1er de Serbie, ancien Saint-Cyrien, il fut nommé régent en juillet 1914, accompagna l'armée serbe dans sa difficile retraite à travers l'Albanie en 1915 et dirigea sa réorganisation. Nommé régent du royaume des Serbes, Coates et Slovènes le 1er décembre 1918, il devint roi en août 1921, mais il eut bientôt à faire face aux problèmes posés par la coexistence de trois nationalités en un même Etat.

L'assassinat, au Parlement de Belgrade, d'un député croate lui fournit le prétexte d'instituer une dictature royale (6 janvier 1929). Malgré le changement du nom officiel du royaume en celui de Yougoslavie (octobre 1929), il resta fidèle à sa politique, qui privilégiait systématiquement les Croates, parmi lesquels s'organisa le mouvement nationaliste terroriste des Oustachis. Sa politique étrangère fut fondée sur l'alliance avec les Tchèques et les Roumains dans le cadre de la Petite Entente. Arrivant en France en visite officielle, il fut assassiné à Marseille par des terroristes croates, en même temps que le ministre français BARTHOU. >>

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PROMOTION "Lieutenant-Colonel JEANPIERRE"
(1959 - 1961)
insigne Jeanpierre
Photo Ristori - Coëtquidan

http://perso.club-internet.fr/mpothuau

 

<< La promotion Lieutenant-Colonel JEANPIERRE est une des dernières promotions recrutées dans la perspective de la guerre d'Algérie. Ainsi s'explique son effectif très important : 484 officiers, auxquels il faut ajouter, à Coëtquidan, une trentaine d'étrangers, Laotiens, Marocains, Tunisiens et quelques représentants de pays de l'Afrique Noire.

Elle est également, autre fait bien plus notable, la dernière promotion dans laquelle les deux sources de recrutement "Ecole Spéciale Militaire" et "Ecole Militaire Interarmes" ont été confondues pour porter le même casoar au sein d'une promotion au nom unique. Il s'agissait des 312 élèves issus des corniches civiles et militaires en 1959, et des 172 officiers et sous-officiers ayant passé le concours de Strasbourg en 1960.

C'est enfin, dernière particularité qui nous a tous profondément marqués, la première promotion depuis 1939 à n'avoir pas eu à rejoindre, à sa sortie des écoles d'application, un territoire où la France était militairement engagée.

N'ayant pas eu l'expérience du combat, la promotion a vécu au rythme des mutations, des commandements, des examens et des diplômes.

 

A partir de choix initiaux d'armes qui reflètent bien les aspirations premières des candidats à Saint-Cyr, les fins technocrates de la DPMAT et de l'EMAT ont provoqué en 1964-1965 une première altération du dispositif en contraignant 30 officiers, de l'Infanterie et de l'ABC, essentiellement, à passer dans le Génie (25) et les Transmissions (5). Pour éviter toute autre ingérence, les officiers de la JEANPIERRE ont préféré, par la suite, décider eux-mêmes ces mouvements pour rejoindre le Matériel (6), l'Intendance (9), le Cadre spécial (7), la Gendarmerie (20), voire le Contrôle (1).

A côté de ces changements dans la continuité militaire, la promotion a vu aussi beaucoup de ses officiers s'engager vers une seconde carrière civile. Mesuré pendant 22 ans (78 départs seulement, soit en moyenne 3 par an), ce mouvement s'est considérablement amplifié en 1984 (32 départs) et surtout en 1985 (82 départs). A ce jour, le pourcentage de civils a dépassé les 40%.

Pour ceux qui sont restés dans la carrière des armes, il suffit de dire que certains d'entre eux ont eu l'occasion de participer aux campagnes du Tchad et du Liban, avec des responsabilités souvent majeures. D'une façon générale, les officiers de la JEANPIERRE occupent actuellement des postes de chefs de corps ou des fonctions "éminentes" (!!!...) dans divers états-majors et institutions : le tribut à l'Administration centrale parisienne frappe plus d'une cinquantaine d'entre nous !

 

Que reste-t-il de la FLAMME de la promotion en 1986, 25 ans après notre sortie de Coëtquidan, 25 ans après avoir quitté la férule ferme et vigilante de nos deux remarquables commandants de bataillon, le Général LAURIER et le Général VERGUET ?

Cette FLAMME, longtemps simple veilleuse, est bien repartie sous l'impulsion de quelques uns, avec l'assentiment de tous. Il suffit, pour s'en convaincre, d'apprécier la solidarité qui nous lie aux familles de nos 18 camarades décédés. De même c'est aussi cette entente qui a permis, à maintes reprises, à ceux d'entre nous qui cherchaient un emploi, de trouver une place dans le même organisme, militaire ou civil.

Et cette FLAMME pourrait bien se trouver pérennisée ainsi qu'en témoigne déjà le choix fait par les fils de certains de nos camarades présents aujourd'hui, en école d'application, à la Spéciale ou en corniche, suivant ainsi les traces de ceux qui, il y a 25 ans, ont formé la très bahutée Promotion Lieutenant-Colonel JEANPIERRE. >>

 

 

Le Lieutenant-Colonel JEANPIERRE
Témoignage du Général LENNUYEUX

Le LCL Jeanpierre

<< JEANPIERRE est né le 14 mars 1912 à Belfort.
Son père, officier de carrière, est tué quelques années plus tard sur la Marne, pendant la guerre de 1914-1918.
Quant à lui, à 18 ans il s'engage.
5 ans plus tard (1935), il est admis à l'Ecole militaire de l'Infanterie et des Chars de combat de Saint-Maixent. Il en sort l'année suivante Sous-lieutenant, deuxième au classement, ce qui lui permet de choisir son affectation : le 1er Régiment Etranger.
Depuis cette date (octobre 1936) il sert sans interruption à la Légion et, après 1939, presque toujours dans une unité combattante.
D'avril 1939 à août 1941, c'est la Syrie ; puis ensuite, quasiment sans interruption, la Résistance et la déportation, l'Indochine et enfin l'Algérie, où il trouve la mort le 29 mai 1958.

JEANPIERRE n'exerçait pas sa fonction comme un métier journalier. Là était le secret de la puissance de commandement qui était en lui.
Tout être sous ses ordres percevait aussitôt en lui le représentant d'un devoir strict, d'une loi morale, en même temps qu'il avait l'impression d'une force sûre, continue, irrésistible.
On le sentait en possession d'une faculté supérieure de décision. On lui aurait obéi sans le comprendre. Il était celui qui, au milieu de l'égarement général, alors que les règles habituelles manquent, savait encore ce qu'il faut faire. Jeune Capitaine, en Indochine, il l'avait déjà prouvé.
Gardiens des disciplines et de l'honneur d'une troupe née sous ce sigle, son autorité reposait sur ce sentiment qu'il savait inspirer du devoir collectif.
Certes ses subordonnés étaient d'élite. Mais ils étaient une arme dure et tranchante qu'il fallait savoir manier. Ardents, résolus et fiers, il fallait savoir les conduire comme ils devaient l'être. JEANPIERRE savait.
Il savait que si ses hommes au combat n'étaient aptes qu'à recevoir et traduire machinalement sa volonté, ils ne seraient encore qu'une chose inerte, mais qu'il fallait les pénétrer d'activité propre et de vie. Il avait le don de communiquer la vie.
Il réalisait au plus haut degré cette "communauté morale de soldats et des chefs" que JAURES appelait de sa grande voix pour l'Armée qui fut celle de 1914.
Maître de lui, étranger à toute affection, il apparaissait dans la gravité simple de l'homme livré à une oeuvre qui absorbe son attention et exige tous ses efforts. Son langage net, sobre et ferme, sa voix précise, impérieuse, son âme simple, sans faiblesse, sans sourire, reflétaient sa conviction. Tenace, c'est à dire incapable d'admettre par lassitude des résultats insatisfaisants, il gardait le sens juste et droit des réalités.
Sa loyauté enfin, faisait la sûreté de ses relations. Ce soldat complet, équilibré, n'était fait ni pour rester dans l'ombre, ni pour se contenter du médiocre.
Lorsque le 29 mai 1958, le Colonel JEANPIERRE sera mortellement frappé dans son hélicoptère guidant l'assaut de ses légionnaires, à nul autre mieux qu'à lui ne s'appliquera la phrase du Maréchal GALLIENI : "La première condition pour une vie d'homme, c'est qu'il ait le droit d'être satisfait de lui-même en étant satisfait de son oeuvre."
JEANPIERRE avait ce droit.
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