2/1
Officier "Taekwondo Crassusse Chic à Pandore Ma Femme Apprend à Conduire C'est Où Le Maroc"
Jean a été tué le 25
octobre 2000, pendant les évènements qui ont suivi les
élections présidentielles en Côte d'Ivoire.
Jean, rentré au pays depuis peu, avait été
arrêté et maltraité à plusieurs reprises
par les hommes de Gueï. Il n'en avait pas pour autant
renié ses convictions.
Les obsèques ont eu lieu le 11 novembre, à Abidjan. Le
secrétaire promo a fait le nécessaire pour que,
malgré l'impossibilité pour nous d'accompagner Jean une
dernière fois, l'appartenance de notre ami à la
promotion Monclar ne soit pas oubliée. Les contacts sont
maintenus avec son épouse et ses enfants, et nous ferons tout
ce qu'il faudra pour les soutenir dans leur douleur, qui est aussi la
nôtre.
... et de taekwondo
A Pau, en 1986, quelques jours avant le
voyage d'études au Maroc
Hommage paru dans Notre Voie, organe officiel du parti de Laurent Gbagbo, n° du 11 novembre 2000
A toi Jean !
On t'appelait Ben John, héros d'un film western ? Non
héros d'une tragédie ivoirienne. Tombé sur le
champ de bataille pour la liberté, la démocratie.
Trahi, tu l'as été. Tes frères d'armes qui
aujourd'hui nous ont quittés l'ont aussi été.
"Il y a des vies courtes mais pleines et des vies longues mais vides,
ennuyeuses et nuisibles". Propos pleins de sens du prêtre hier
matin dans son homélie à IVOSEP lors de la levée
du corps.
Jean Siaka Remarck, tu es le symbole de cette Côte d'Ivoire qui
doit s'unir, se réconcilier. Tu as été de ton
vivant exemplaire, dur, car tu avais un idéal, des
convictions. Tu savais, ce mercredi matin, ce 25 octobre, que tu
pourrais ne pas revoir ta famille, tes enfants. Que la mort pouvait
être au bout. Mais Jean, tu n'as pas reculé. En
dépit de ta sortie de convalescence suite à des
sévices subis, déjà, par des frères
d'armes. Tu voulais que le sang ne coule plus inutilement sur cette
terre de paix. Le tien a coulé.
Tu as été trahi, pardonne-leur.
Puisse la Côte d'Ivoire retrouver sa dimension
multiséculaire, multiconfessionnelle, multiethnique autour de
toi Jean Siaka, fier fils de cette terre où tu reposes
à jamais. Terre pour laquelle tu as décidé de
donner ta vie.
Repose en paix, Ben John !
Elyane Hervo
Lien vers Notre Voie :
http://www.notrevoie.com
Aller dans les archives, n° 737 du lundi 30 octobre 2000 :
récit de la nuit du 25 octobre durant laquelle Jean a
trouvé la mort.
Je rappelle que Notre Voie est l'organe officiel de Laurent Gbagbo,
et que par conséquent cette version des faits est à
considérer avec beaucoup de prudence...
Les photos qui suivent m'ont été fournies par le CEN MASSONI, qui a côtoyé Jean au CID.
Toujours au CID, lors d'un voyage
d'étude à La Réunion
LORSQUE LA TRADITION MENACE LA
SÉCURITÉ.
Le cas des Dozos en Côte d'Ivoire.
Par le CBA REMARCK
(ARMÉE DE TERRE/CÔTE D'IVOIRE)
article rédigé durant la scolarité
CID
Au siècle dernier, que ce soient les hordes de Tchaka Zoulou dans le sud ou les Amazones du roi Béhanzin ou même les milices du Moro Nabat et l'armée de Samory Touré dans la partie occidentale du continent, l'histoire de l'Afrique était riche d'une véritable tradition guerrière.Ces épopées sont véhiculées aujourd'hui encore par les détenteurs de l'oralité que sont les griots. La réminiscence de ce passé, confinée dans le folklore, est savamment distillée aux touristes étrangers en mal de dépaysement, de danses traditionnelles et de coups de soleil.
Cependant, ces dernières années, en Afrique de l'ouest, est apparu un phénomène nouveau. Les guerriers traditionnels sont sortis de ce rôle limitatif pour s'ériger en véritable force de sécurité au grand dam des autorités légales.
En fait, face à la montée du grand banditisme et à la difficulté pour les forces de l'ordre de la juguler, les populations des villes ont fait de plus en plus appel à des vigiles d'un genre nouveau : les guerriers ou chasseurs traditionnels.
Ce phénomène n'est pas sans risques puisqu'il est à la base de la guerre civile en Sierra Leone et qu'il atteint des proportions inquiétantes en Côte d'Ivoire.
Avant de proposer une ébauche de solution ou du moins, de mesures à prendre, il est nécessaire, pour une meilleure compréhension du sujet, de préciser la place des traditions dans la société africaine, puis de faire un bilan du problème des Dozos.
" Ecoute plus souvent les choses que les êtres
la voix du feu s'entend, entends la voix de l'eau " Birago Diop.Le continent africain baigne dans un climat de mystère, de croyances occultes qui font partie de la mémoire collective et qui se retrouvent dans les traditions surtout guerrières.
L'animisme est de loin la "religion" la plus répandue en Afrique de l'ouest. Elle concerne, par exemple, près de 40% de la population ivoirienne. D'ailleurs, même quand la religion officielle est l'islam, celle-ci reste empreinte de pratiques animistes. Au Sénégal, par exemple, où l'islam concerne 90% de la population, les marabouts ont un rôle qui dépasse et de loin le strict cadre de la religion. Ils chassent les mauvais esprits, guérissent par les plantes, lisent l'avenir et préviennent des malheurs par des invocations dont ils ont seuls le secret.
Aucun Africain quel que soit son statut social n'échappe à l'influence des traditions animistes. C'est une donne qu'il faut prendre en compte dans le respect ou la crainte qu'inspirent ceux qui, comme les guerriers traditionnels, en sont les détenteurs.
La société africaine est subdivisée en confréries : les griots, les marabouts, les forgerons et les guerriers en sont une illustration. Chaque groupe a ses particularités et se transmet généralement le savoir ou les "pouvoirs" de père en fils.
Les guerriers traditionnels n'échappent pas à cette règle. L'exemple de la Côte d'Ivoire est révélateur : les Dozos, ou Donzons, y forment une caste et appartiennent à la tribu mandingue située au nord du pays. En fait, si le terme est devenu générique, il regroupe trois fonctions. Les Dozos sont les chasseurs chargés de fournir à la tribu la viande dont elle a besoin. Les Tombolomas quant à eux assument la fonction de protection du village, des biens et des personnes. Tandis que les Sofas sont assimilables aux militaires chargés de refouler les éventuels envahisseurs.
Le drame actuel est que, pour des raisons conjoncturelles, ces chasseurs traditionnels prennent pied dans des activités et des fonctions qui ne sont pas les leurs.
La guerre du Libéria a accru le sentiment d'insécurité et la population s'est alors retournée vers une police parallèle.
Sept années de guerre civile n'ont pas épargné les pays voisins. Les Ivoiriens ont vu affluer cinq cent mille réfugiés libériens avec pour corollaire le développement de trafics d'armes et de drogue ; ce qui, face à une jeunesse désuvrée et pléthorique, a favorisé les attaques à main armée et le banditisme en tout genre.
La police, malgré un accroissement très sensible de ses effectifs, a bien du mal à contenir la flambée. Il s'est alors produit un phénomène qui n'est pas sans relation avec l'attachement et dans une certaine mesure la crainte séculaire voués aux mythes et aux mystères qui entourent les Dozos. Leurs pouvoirs traditionnels leur ont valu d'être sollicités par une population en quête de sécurité. Des groupes d'autodéfense ont fleuri à travers tout le territoire pour devenir de véritables sociétés de vigiles, composées de chasseurs de plus en plus portés par les retombées financières découlant de ce business" d'un genre nouveau. Il n'est pas rare, en déambulant dans les rues d'Abidjan, de voir ces gardiens dans leurs accoutrements traditionnels avec en bandoulière un fusil de chasse, couverts de gris-gris censés les protéger, sûrs de leur fait et gardant, qui un magasin, qui un domicile. Tout cela en totale impunité.
Les risques sont réels.
Au Sierra Leone, les Kamajors, qui sont les chasseurs traditionnels locaux sont à l'origine de la guerre civile qui a ravagé leur pays. Regroupés derrière leur leader charismatique, Fodey Sankoh, ils ont mené une guerre fratricide, se livrant à des massacres sans nom. Ils sont aujourd'hui organisés en parti politique - le Front Révolutionnaire Uni et, après d'âpres négociations, ont obtenu des postes de premier plan au sein du gouvernement qui se met difficilement en place. Fodey Sankoh n'est autre que le vice-président.
La Côte d'Ivoire se doit d'éviter une telle dérive. Actuellement, bien qu'il soit prouvé que ces chasseurs ne sont pas tous originaires du nord du territoire, bien qu'ils ne soient pas tous musulmans, un courant ethnocentriste, habilement utilisé par certains groupes de pression, tend à faire croire à une persécution orchestrée contre une frange de la population. Cela conduit à une radicalisation du problème, et du coup, de simples mesures de prévention deviennent une volonté masquée de martyriser une population ciblée.
Les autorités légales ont malgré tout entrepris des démarches pour limiter les risques d'une crise sociale majeure.
Un recensement a été diligenté et des décrets ont fixé des limites au développement du phénomène des Dozos. Mais des mesures particulières sont à envisager.
En février 1999, plus de 40 000 chasseurs ont été recensés. Leur zone d'activité touche toutes les villes de Côte d'Ivoire et même tous les quartiers d'Abidjan. Constat plus inquiétant, ils possèdent plus de 33 000 armes modernes, surtout des calibres 12, sans aucun permis de port d'arme. Ils ne cachent pas leur volonté d'être reconnus et tentent d'organiser des regroupements qui pourraient déboucher sur une forme de syndicalisation du mouvement. Le danger de dérive est manifeste.
C'est pourquoi un décret a interdit toute activité des Dozos en dehors de leur sphère géographique culturelle, à savoir le Nord. De surcroît, la possession des fusils a été prohibée, notamment et surtout dans la ville d'Abidjan. L'application stricte de ces mesures doit conduire à la confiscation des armes mais aussi à une remise en confiance des véritables Dozos.
Les anciens, gardiens d'une tradition multiséculaire, doivent voir avec dépit leurs rites, leurs manières de vivre et d'éduquer leurs enfants travestis en vulgaires entreprises commerciales dénuées de tout le respect et le secret qui entourent normalement le monde des chasseurs. En participant à des campagnes de sensibilisation, ils peuvent freiner l'expansion du mouvement. De plus, Ils deviennent ainsi acteurs et non plus victimes d'une décision légale. Mais les forces de l'ordre ne doivent pas être en reste.
La police et la gendarmerie ont un rôle à jouer en attaquant la cause et non les conséquences du mal. C'est le nombre croissant d'agressions qui explique la psychose de la population et sa quête d'une solution même illégale. En combattant avec succès le banditisme il est évident que les Dozos ne passent plus pour la solution du désespoir.
Quant à l'armée, jusque là laissée en dehors de la résolution de cette crise, elle peut par des tournées de brousse plus fréquentes, "marquer" le territoire en jouant la carte de la dissuasion. Un fait est intéressant et a été révélé par les préfets de régions : pendant et immédiatement après le passage des militaires dans une zone jusque là peu fréquentée par l'armée, ils ont noté une baisse drastique des agressions et la disparition des faux Dozos. C'est sans doute là aussi une voie à explorer.
Finalement, bien que le problème des chasseurs traditionnels soit sérieux, il fait l'objet d'une prise de conscience nationale et interpelle autant la population en droit à une exigence de sécurité, que l'état qui doit reprendre à son compte une de ses prérogatives. Le consensus existe et peut être la base d'une solution. Mais il n'en demeure pas moins vrai qu'une place de choix doit être réservée à la conservation des traditions qui après avoir été rejetées, refoulées, démontrent qu'elles restent omniprésentes dans la culture ivoirienne, faite d'hospitalité, de tolérance et de dialogue.